L’espace du Rocher à Magnac-Laval a fait le plein jeudi 15 février pour la conférence organisée par l’Association Pour la Santé de la Terre et du Vivant, en présence, entre autres, de Paul François, auteur du livre « Un paysan contre Monsanto ».

https://www.youtube.com/watch?v=E1JOZ80zBe4&feature=youtu.be

La conférence organisée par l’Association pour la Santé de la Terre et du Vivant à Magnac-Laval, dans la Haute-Vienne, a drainé plus de 150 personnes venues écouter différents témoignages plus édifiants les uns que les autres. Sur l’estrade de l’espace du Rocher, Mathilde Scheuer, pharmacienne et animatrice de l’association, était entourée de Marcel Mézy, paysan-chercheur, de Paul François, agriculteur charentais auteur du livre « Un paysan contre Monsanto », de Pauline Blanquet docteur en microbiologie au laboratoire créé voici deux ans par Marcel Mézy, de Maxime Mignonac, éleveur Bio de brebis laitières et de Mathieu Causse, éleveur Bio d’un troupeau de race Aubrac et président de l’Association.

Après avoir présenté les différents intervenants, Mathilde Scheuer a évoqué les objectifs de l’association Pour la Santé de la Terre et du Vivant qui se veut être un trait d’union entre le monde agricole et les consommateurs. A un moment où le questionnement sur les modes de production, sur le lien ténu entre les pratiques culturales, les plantes, les animaux et au bout de la chaîne les consommateurs, apparaît de plus en plus comme une évidence.

Évoquant la reconnaissance récente de maladies, la maladie de Parkinson ou certains cancers comme maladies professionnelles pour les agriculteurs, Mathilde Scheuer a insisté sur les dégâts causés par l’usage des pesticides et des produits phytosanitaires, profitant à cette occasion de saluer la présence de Paul François, un agriculteur qui se bat sans relâche depuis près de dix ans contre Monsanto pour faire reconnaître le lien existant entre ses graves problèmes de santé et l’utilisation des produits mis sur le marché par la firme Monsanto : « Notre philosophie est d’encourager toutes les actions qui peuvent conduire à une diminution générale de leur utilisation par les agriculteurs et de leur consommation pour les consommateurs ».

Mathieu Causse, président de l’association, a présenté ensuite la jeune association qu’il préside et qui est née de la réflexion de quelques éleveurs, utilisateurs des Technologies Marcel Mézy : « Il existe d’autres voies que l’agriculture conventionnelle et le succès que rencontrent les conférences que nous organisons nous encourage à aller encore plus loin. Il faut continuer le maillage sur le terrain et s’appuyer sur toutes les bonnes volontés. Sans les consommateurs, nous ne sommes rien. Nous avons le pouvoir de changer les choses et avec les micro-organismes, Marcel Mézy qui est un précurseur, a tracé un sillon que, pour ma part, je suis depuis plusieurs décennies.

L’Association Pour la Santé de la Terre et du Vivant, veut avant tout rassembler tous ces paysans, consommateurs, scientifiques qui ont décidé de porter le même message pour une agriculture respectueuse et pleine d’avenir ».

Une vie de lutte contre Monsanto

Paul François, 54 ans, agriculteur charentais, a ensuite raconté son parcours, toutes ces années où il a pensé comme beaucoup que « le sol n’était qu’un support et qu’il suffisait de lui donner à manger ».

Sorti de l’école à 18 ans, il part travailler sur diverses exploitations agricoles et sociétés de production de semences avant de revenir sur l’exploitation familiale au début des années 90. Sur 200 hectares, il pratique alors une agriculture intensive : « La chimie nous avait apporté du confort et nous permettait alors d’augmenter nos rendements. Je n’y voyais que du bénéfice. Ça peut choquer aujourd’hui, mais je ne pouvais pas envisager de faire autrement ».

Cent hectares en monoculture maïs, les cent autres avec blé et colza en rotation, du Round-up entre les cultures plutôt qu’un couvert végétal, Paul François ne se posait pas de questions jusqu’au jour où les rendements ont commencé à plafonner : « A la fin des années 90, les rendements n’augmentaient plus et ensuite, plus on mettait de chimique et plus ça baissait ».

Paul François a alors la chance de s’associer avec un autre agriculteur, un voisin qui cultive 160 hectares et pense qu’il existe d’autres alternatives : « C’est avec lui que j’ai commencé à remettre ce modèle agricole en question. Ma terre était morte, il a fallu dix ans pour y revoir du vivant ».

Paul François assurait près de 90% des traitements sur l’exploitation et sur le maïs, il utilisait du Lasso, un herbicide de chez Monsanto : « En avril 2004, après avoir désherbé le maïs, j’ai voulu vérifier que ma cuve était propre avant de traiter les colzas. J’ai inhalé du gaz dans cette cuve et après ma douche j’ai perdu connaissance ». Sa femme Sylvie, infirmière de formation, le conduit à l’hôpital où il est mis sous assistance respiratoire. Une première alerte qui laissera des traces avec des problèmes de concentration, un amaigrissement important et une irritabilité croissante.

En novembre 2004, Paul François va être hospitalisé pendant cinq mois, à la Salpêtrière puis en hôpital psychiatrique. Des mois de souffrances au cours desquels il se heurte à un mur dans le milieu médical quand il commence à évoquer une démarche de reconnaissance de ses problèmes en maladie professionnelle.

Tribunal de Grande Instance, Cour d’Appel, comme le dit Paul François « quand on s’attaque à Monsanto, on s’attaque à un monstre ». En février 2012, pour la première fois en France, un particulier fait condamner Monsanto. Nouvel appel, cour de Cassation, le paysan charentais se dit broyé par la machine judiciaire et par les manœuvres d’intimidation de la firme Monsanto.

Grâce au soutien de sa femme et de ses deux filles, Paul François a décidé de continuer le combat en devenant président de l’association Phyto-victimes qui compte aujourd’hui trois permanents et est très active au niveau national et œuvre efficacement à la reconnaissance de ces maladies professionnelles.

Par le biais d’un fonds participatif, il a réussi à lever 60 000 euros qui vont lui permettre d’aborder plus sereinement un nouveau procès qui s’annonce pour fin 2019.

Dans le courant de l’année 2018, c’est toute l’exploitation de Paul François qui sera en Bio : « Aujourd’hui j’éprouve un tel sentiment de liberté sur mes terres. Je ne suis plus assujetti au technicien qui m’envoie un sms pour me dire de traiter… La faune, la flore, le gibier, la vie est revenue sur mon exploitation ».

Paul François termine son intervention en qualifiant de « crime contre l’humanité » ce que sont en train de perpétrer les firmes comme Monsanto dans une agriculture à l’agonie.

Très applaudi par une assistance très émue par ce témoignage, Paul François prit ensuite le temps de dédicacer quelques exemplaires d’« Un paysan contre Monsanto », livre qui raconte son combat.

De riches échanges avec le public

https://www.youtube.com/watch?v=Tasco8LAq6k&t=171s

Maxime Mignonac, 45 ans, n’est pas du genre à s’apitoyer sur son sort. Atteint de la maladie de Parkinson, l’éleveur de brebis aveyronnais est passé en Bio en 2006 : « Je remercie tous ceux qui font du bien à la planète et nous redonnent la fierté de faire ce métier. Nous avons tellement plaisir à revenir sur nos parcelles où la vie est revenue. Les vers de terre sont revenus, dans les ruches, les abeilles se portent mieux, je suis heureux d’avoir connu les technologies Marcel Mézy. C’était sûrement trop tard, mais je suis quand même heureux ».

La transition était toute trouvée pour laisser alors la parole à Marcel Mézy qui retraça son parcours et dit toute sa fierté d’avoir maintenant à sa disposition un laboratoire de très haut niveau pour lui permettre d’aller plus loin dans ses recherches avec notamment des ingénieures telles que Pauline Blanquet.

Docteur en microbiologie, elle a intégré le laboratoire de Marcel Mézy dès son ouverture et elle n’a pas manqué d’insister sur le rôle encore peu connu des microorganismes, « ces petits soldats » qui vont avoir une tâche précise et vont se mettre à travailler ensemble dans le sol. Faire le lien entre la qualité du sol et les produits qui y poussent mais aussi ses conséquences sur la santé humaine, ce ne sont pas les missions qui manquent pour Pauline Blanquet et son équipe de chercheurs.

Avant les questions du public, il revint à Mathieu Causse de clore les interventions : « Quand je vois tous ces drames, je me dis que ma vie est un conte de fée… » Le président de l’Association Pour la Santé de la Terre et du Vivant a ensuite pris le temps de raconter l’histoire de son exploitation, lui qui n’a connu que les technologies Marcel Mézy depuis qu’il s’est installé en 1999. Passé en Bio la même année, il se dit « fier de faire ce métier, fier de s’être remis en question ».

Les questions n’ont pas manqué à l’issue de la conférence. Une femme s’est dite inquiète pour son voisin récemment installé en zone de moyenne montagne et se demande comment s’y prendre pour l’amener vers ces nouvelles technologies. Un ingénieur agro, installé comme éleveur Bio, a cherché à en savoir plus sur ces micro-organismes ramenés dans les sols, quand un autre s’exprimait au nom de la Confédération Paysanne du Limousin.

Le dernier témoignage fut sûrement le plus émouvant avec une jeune étudiante, future exploitante agricole : « J’ai fait neuf ans d’études agricoles et tout ce qu’on nous a appris c’est toujours plus de pesticides, toujours plus d’engrais. Il n’y a que cette année où on nous apprend qu’il existe d’autres méthodes. Il faut penser à tous ces jeunes. Il faut faire quelque chose, il faut faire des interventions auprès des jeunes dans les écoles ».

Un témoignage ou plutôt un appel de la nouvelle génération qui veut qu’on lui donne la possibilité de choisir son avenir et qu’on sorte enfin d’un discours unique dans l’agriculture. Une raison de plus pour l’Association pour la Santé de la Terre et du Vivant d’aller au-devant des consommateurs, des paysans et aussi bien sûr des collégiens, lycéens et étudiants pour continuer à dénoncer tous les abus et proposer des solutions pour une agriculture responsable et saine.

PATRICK LE ROUX

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